Saint-Hippolyte-du-Fort (Gard, FRANCE)

Grand Temple de l'Église Réformée

Présentation du relevé de l'orgue.


De la machine à
écrire au langage
HTML.

O Conventions usités.
O Bibliographie, et remerciements.
O Plan du relevé.

Sommaire



   Écusson de Saint-Hippolyte revu et corrigé.

     C'est en 1990 que j'ai entamé un relevé complet de l'orgue du Grand Temple de l'Église Réformée de Saint-Hippolyte-du-Fort, mon village natal. Ceci fut fait dans une perspective la plus archéologique que me le permettaient mes moyens de l'époque. L'instrument était alors presque injouable et je me suis fixé le but de le décrire avec suffisamment de détails pour qu'il puisse être reconstruit dans son intégralité même s'il venait à brûler - ou être détruit - entièrement. Ce ne fut heureusement pas le cas et il fut restauré en 1992 par Laurent PLET et son équipe.

     Mon relevé de 1990 contenait quelques 160 pages (la nouvelle version numérique comporte 300 fichiers !). Il n'a été diffusé - principalement dans mon entourage - qu'à environ 100 exemplaires. Je dois reconnaître qu'il est assez frustrant de consacrer du temps à un travail sachant pertinemment que l'on ne sera que peu lu. Profitant de l'avènement dans le grand public du réseau Internet et, plus encore, du standard HTML utilisé sur la toile, j'ai donc pensé qu'il ne serait pas inintéressant de traduire mon relevé sous une forme hypermédiatique afin de le présenter à un public infiniment plus large que celui que constituaient mes proches et donc, par définition, ayant une chance d'être un peu plus intéressé...

     La restauration de 1992 faite par Laurent PLET et son équipe a apporté un éclairage nouveau à l'idée même que je me faisais de cet orgue deux ans plus tôt ; l'instrument est aujourd'hui devenu complet grâce à l'achèvement du devis de 1853. La vie m'a, de plus, amené à travailler en Allemagne sur un instrument de style tout à fait comparable et j'ai - comme tout un chacun - pu prendre conscience d'une infinité de détails qui m'ont, eux-mêmes, amenés à corriger - parfois notablement - mes points de vue de 1990. Ainsi, le cornet de cet orgue ne sonne t-il pas « plus classique français qu'il y pourrait paraître » comme je le disais alors, car il s'agit, à Saint-Hippolyte, d'un jeu dont l'harmonie est très influencée par la sesquialtera allemande. De même, si la charpente de l'ensemble de l'instrument a bien pu soutenir les sommiers depuis 150 ans, il n'en reste pas moins, au contraire de ce que j'affirmais il y a huit ans, qu'elle est conçue de façon aberrante, où tout semble mis en œuvre pour que la mécanique soit trop tendue en hiver et trop lâche en été...

     Plus que tout autre chose, il faut ici préciser un point d'importance ; malgré la somme considérable de travail que je lui ai consacré, je n'ai jamais estimé l'instrument de Saint-Hippolyte plus génial qu'il n'est, bien au contraire : mon goût est en effet nettement plus porté aux instruments français du début du XVIIe siècle et il s'agit là d'un orgue typiquement allemand du milieu du XIXe ! Par contre, la paroisse protestante de Saint-Hippolyte, propriétaire de l'instrument, m'a toujours laissé libre accès à ses claviers, sa mécanique ou sa tuyauterie. J'ai donc pu à loisir, tant dans mon apprentissage qu'aujourd'hui, y faire toutes sortes de relevés qui ont eu le grand mérite de m'ouvrir toujours plus au concept d'archéologie de l'orgue que je pose aujourd'hui - en tant que facteur restaurateur - sur le même plan que l'approche purement musicale de l'instrument roi.

     Car c'est bien d'exercices de style qu'il s'agit ; tant en 1990 qu'aujourd'hui, j'aimerai, par ce travail, pouvoir faire avancer l'idée que le témoignage de l'état de nos instruments anciens, particulièrement dans cette vieille (mais au combien passionnante !) Europe, est devenue une nécessité pour la compréhension de notre culture musicale, elle-même si intimement liée à notre culture tout court. Si le relevé d'une moulure en sapin du XIXe siècle (de surcroît de mauvaise qualité) apparaît à beaucoup aujourd'hui dérisoire, n'est-il pas tentant de penser que nous serions heureux de posséder une description précise des instruments médiévaux ou, plus encore, des hydraules qui sonnaient dans les cirques des premiers siècles de notre ère ?

     Partant de cela, n'avons nous pas aujourd'hui le devoir, sachant que nous possédons des moyens de publication abordables, de rapporter par l'écrit et de conserver le plus possible ce que le temps effacera forcément un jour et que nos arrières petits enfants jugeront avec plus d'égards que ceux que nous pouvons accorder aux siècles qui nous précèdent ? La grande capacité de reproduction de déplacement et de conservation qu'offrent les documents numériques amène un jour nouveau pour les archéologues-restaurateurs que nous nous devons d'être quand nous manipulons les instruments anciens. Pouvoir de surcroît mêler ensemble textes, images, photographies et enregistrements sonores permet de mieux situer les instruments dans les lieux et les cultures où ils sont apparus. Une fois comprise la nécessité contemporaine de témoigner non plus à un seul expert ou à une communauté d'individus - aussi avertis que restreints - mais au monde entier, sans aucune distinction préalable, il devient possible d'ouvrir le sujet de l'orgue (comme de tout autre d'ailleurs) à un public plus large et d'inciter son goût à la découverte d'objets nouveaux qu'il peut être amené à rencontrer par le voyage, quant à lui bien réel et dépourvu de toute virtualité.

     Ce dernier point me paraît devoir être souligné plus que tout autre. Aucun relevé, aucune monographie, aucune description, fut-elle la mieux écrite et la mieux illustrée ne remplacera jamais l'émotion que procure la visite et l'écoute entre ami d'un instrument. Il ne s'agit en aucune manière de se servir de l'outil informatique comme d'aucuns envisageraient de dégauchir une planche de bois avec une ponceuse à bande. Chaque outil possède sa place et sa finalité qu'il est souvent mauvais - voire dangereux - de vouloir modifier. Mais refuser de s'approprier un outil simplement parce qu'il est nouveau et qu'il demande une adaptation conceptuelle m'apparaît être une démarche profondément figée, qui ne regarde ni le passé, ni l'avenir et qui, dans cette frilosité autoréférencielle, ne peut qu'être stérile et vide de sens au sein d'un millénaire qui s'annonce communiquant.

     Puisse donc ce que je crois être à ce jour le premier relevé d'orgue ancien mis à la disponibilité du réseau Internet, faire avancer cette idée de partage, chère à mon cœur, sans laquelle la musique comme le reste se réduisent à l'accomplissement de rites, au mieux seulement symboliques, mais qui, outrageusement, oublient leurs fonction première : l'humanité.



S.M.C.J., Graniers, ce 26 novembre 1998



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