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(αγορα ύδραυλις)


L'Hydraule

accord et méthode
lundi 19 janvier 2004 23:04:13
Comme tout (ou presque ?) organiste, il m'arrive d'accorder "à la va-vite" un jeu d'anches avant un office ou autre. (là, ca y est, j'entends les facteurs gronder....)

J'ai vu pratiquer, par le facteur qui entretien notre instrument, plusieurs techniques:

1- accord de la première octave anche sur prestant, puis le restant anche seule, note à accorder sur octave.

2- tout le clavier anche + principal 4

3- 1ère octave avec un machin électronique, le reste anche seul avec l'octave (là, je doute, s'il n'y a plus d'Artisanat, y a t il encore de l'art ?)

Qu'en pensent les pros ? y a t il d'autre méthodes ?

je parle évidemment d'un tempérament égal.
Re: accord et méthode
mardi 20 janvier 2004 13:15:27
Les facteurs qui s'occupent de Moyeuvre (orgue au tempérament égal) procèdent de la sorte :

Accord de la partie ut sur une octave au milieu du clavier avec prestant 4. Ensuite on accorde le grave et l'aigu en référence sur la partie établie sans prestant. On procède de même pour la partie ut#.

Il est préférable d'accorder sur le prestant, car avec un truc électronique, on risque d'accorder à côté des fonds (or ce sont les fonds qui "donnent le la" en fonction de la température - cf. plus bas dans ce forum...).
Accord tempérament égal ?
mercredi 21 janvier 2004 08:28:24

OK, cela suppose qu’on ait un prestant accordé juste, au tempérament égal.

Je souhaiterais avoir vos lumières sur le problème suivant :

Dans le cas d’un orgue d’étude d’un bourdon 8’ (ce qui est mon cas), il n’y a donc pas de base prestant pour l’accord.

Le jeu en question « sonne » actuellement un peu faux. En fait, il a été accordé comme çà, à l’oreille par le facteur qui l’a installé, selon un tempérament légèrement inégal.

C’est bien si on se cantonne à de la musique « ancienne », mais il se trouve que j’aime bien Vierne où ça module dans tous les sens et certaines tonalité sont limite dans cet accord inégal (ex : fa#).

Je souhaite pour le prochain accord de l’instrument, obtenir un tempérament **strictement** égal. Je crois savoir que c’est le type d’accord le plus difficile à réaliser à l’oreille, car aucun intervalle n’est « juste » (à l’oreille) dans ce tempérament.
Est-ce que vous pensez qu’un bon facteur puisse y arriver correctement uniquement à l’oreille, sans prendre comme base un accordeur électronique ou clavier numérique ?
Re: Accord tempérament égal ?
vendredi 23 janvier 2004 17:07:08
la plupart des bons facteurs doivent à mon avis pouvoir accorder un orgue au tempérament égal à l'oreille. On part d'une note accordée au diapason voulu et ensuite c'est probablement histoire d'expérience...
js
Re: Accord tempérament égal ?
vendredi 23 janvier 2004 19:30:30
Pour avoir il y a bien longtemps tenu les notes pendant la réalisation de la "partition" (accord de l'octave centrale du prestant), on progresse par quintes tempérées à partir du la du diapason (en se ramenant toujours dans la gamme centrale par des octaves). L'accord des quintes tempérées se fait d'après la fréquence des battements que l'on entend sur la résultante en 8' de la quinte jouée sur le 4'.
Juge de paix : au bout de 12 quintes, on doit retomber sur l'octave pile !
Re: Accord tempérament égal ?
dimanche 1 février 2004 18:02:35
En tout cas c'est, je crois, à peu près la méthode employée par les accordeurs de pianos (mais les sons du piano n'étant pas tenus, il peut y avoir des "trucs" spéciaux).
st nicolas
Re: Accord tempérament égal ?
mardi 15 juin 2004 23:55:48
A l'intention de Mr Harrand : accord en tempérament égal .
Pour réaliser une partition égale un accordeur digne de ce nom se doit de connaitre à fond toutes les caractérisques intimes du tempérament choisi . Les rapidités des quintes et quartes (fréquence des battements) ne lui sont pas suffisantes pour atteindre ce but . Outre le contrôle de la progressivité des battements de tierces et sixtes il doit connaitre et réaliser ce que j'appelle personnellement les "identités remarquables" du tempérament visé .
par ex : tempérament égal ordinaire ( médiocre pour le piano)
la sixte et la tierce dont les basses respectives sont distantes d'un ton doivent battre à la même fréquence (vrai à 1/10 de battement près)
sixte fa2re3 = tierce sol2si2 etc ...
la tierce et la dixième dont les notes supérieures forment une octave doivent battre à la même vitesse (synchronisme absolu)
fa2la2 = fa2la3 voila en vrac qq combines ...

Re: Accord tempérament égal ?
dimanche 1 février 2004 21:38:32
Accorder un bourdon seul est ce qu'il y a de plus difficile. En effet, le bourdon ne diffuse que des harmoniques impaires c'est à dire aucune harmonique d'octave. Donc au niveau de l'audition, établir une partition sur un bourdon nécessite une oreille très affutée et beaucoup de patience.

Pour ce qui est du tempérament égal, c'est à dire celui ou rien n'est juste sinon les octaves (et ou donc tout sonne mal...), il en existe autant que de personnes qui accordent et les manières de l'obtenir diffèrent selon les facteurs. D'ailleurs les appareils électronique que certains appellent "orgue" ne sont même pas capable d'être juste et souvent même les octaves sont fausses... Alors...

Il faut bien être conscient que l'oreille humaine n'est pas un oscilloscope et qu'elle diffère d'un être à un autre. C'est ainsi que les pianos sont accordés dans les graves et les aiguës "acoustiquement faux" pour corriger les faiblesse "mathématiques" de l'oreille. Ainsi, l'oreille entend juste des intervalles qui pourtant ne le sont pas...

Pour en revenir à l'orgue, la justesse absolue n'existe pas dans cet instrument. Qu'on se le dise...

Comme toujours, il y a des orgues toujours très faux (néoclassique) souvent pas insuffisance d'alimentation et d'autres qui restent particulièrement juste (certains Cavaillé).

Imaginons ce que devait être la justesse du temps ou les ventilateurs n'existaient pas et ou les souffleurs étaient des ivrognes...
Re: accord et méthode
jeudi 22 janvier 2004 00:10:32
N'étant pas spécialiste, je ne peux pas vous répondre, mais une chose me laisse dubitative: les méthodes que vous indiquez ne peuvent-elles pas aussi être utilisées pour un tempérament autre qu'égal?

Il me semble que si une octave complète du prestant est accordée suivant le tempérament souhaité, ça devrait marcher.
Re: accord et méthode
jeudi 22 janvier 2004 17:51:51
Il y a peut-être plus rapide (mais je ne l'ai fait que pour un virginal) : il est facile, dans la partition centrale, d'accorder; soit les quintes justes, soit les tierces justes, selon le type de tempérament.
Mais, sur mon orgue en tempérament égal (hélas), j'accorde sur la flûte 4 (n'ayant pas de prestant) pour l'octave centrale, et ensuite, souvent, comme me l'a appris Cicchero (venu une fois pour réparer mes dégats sur la dernière octave de la voix humaine), par octave sur l'anche seule.
Re: accord et méthode
dimanche 1 février 2004 14:32:03
Il y a plusieurs méthodes pour accorder des anches. Certaines sont franchement moins bonnes que d'autres.
Accorder, c'est ajuster les harmoniques communes d'un son par rapport à un autre. Il est donc plus facile d'accorder des sons qui diffusent beaucoup d'harmoniques que d'autres qui en diffusent peu (bourdons par exemple). D'autre part, l'oreille admet une grande tolérance par rapport à un accord acoutiquement pur (et juste donc). Cette tolérance est énorme dans les graves.
Accorder a partir des graves comme le font visiblement certains, ne permet pas d'obtenir un accord fiable. Pour ceux qui ont déjà accordé des anches, prendre le C1 de trompette sur de C1 du prestant donne un résultat facile à obtenir pour notre oreille. On dispose d'une très grande plage d'accord ou l'oreille entend juste (le timbre lui peut changer en fonction de la position de la rasette). Il est donc facile a cause de notre oreille imparfaite d'entendre un accord juste dans le grave. Mais lorsque l'on reporte cet accord par octave (sans prestant) dans l'aiguë, on a des surprises... ce qui sonnait juste dans le grave ne l'est plus du tout dans l'aiguë...
On pourrait dire alors qu'il faut accorder à partir des aiguës. C'est le problème inverse. Trop de précision peut nuire à l'accord parce que à la moindre secousse dans le vent, au moindre obstacle à proximité du tuyaux et tout est faux.
Il convient donc de partir sur une région médiane (3ème octave sur le prestant) pour établir une octave de référence sur le jeu que l'on veut accorder. Ensuite, une fois la 3ème octave accordée du jeu d'anche on la reporte sur toute l'étendue du clavier (sans le prestant). Cela sous-entend d'avoir un prestant (en tout cas une 3ème octave) assez juste. Lorsque le prestant est parfaitement juste (ce qui est très rare), on peut le conserver lorsque l'on reporte le jeu d'anche sur toute l'étendue du clavier, mais attention, il faut de la patience et de l'expérience.
Certains pense qu'un jeu comme la voix-humaine qui s'utilise avec des jeux de fond doit s'accorder sur toute l'étendue avec le prestant. Je ne le pratique pas mais je respecte.
Pour en revenir à la tolérance de l'oreille, il ne faut jamais accorder deux jeux à l'unisson. Cela manque de précision. C'est à dire ne pas accorder trompette 8 sur trompette 8, cromorne sur trompette, hautbois sur trompette, etc, etc... mais 8 sur 4, 4 sur 8, 16 sur 8. Il est préférable d'accorder ensemble les jeux qui doivent être joué ensemble : Clairon sur trompette, bombarde sur trompette (avec éventuellement le clairon).

Pour embrouiller un peu plus, un de mes Maîtres m'a dit : il ne faut pas accorder juste, mais il faut accorder beau...
entendre par là qu'il vaut mieux selon lui privilégier le timbre plutôt que la justesse.
Je précise qu'il est sur certains orgues impossible d'obtenir des jeux parfaitement accordés et qu'il faut toujours faire des compromis pour que cela sonne le moins faux possible... (c'est quasiment le cas de tous les orgues néoclassiques ou de séries mais aussi des tout petits orgues genre continuo...
Re: et pour la tierce ?
mercredi 4 février 2004 20:38:53
au fait qu'est-ce qui est le mieux pour accorder un jeu de tierce ?

j'avoue que ce n'est pas facile : la dernière fois je suis parti des graves (alors qu'avec les anches je me base sur le medium comme vous le dites)
Re: et pour la tierce ?
samedi 7 février 2004 20:26:02
Et non, ce n'est pas facile.
Lorsque j'indiquais qu'il faut débuter l'accord par le médium, je parlais évidemment des anches.
POur les fonds c'est tout autre chose.
La tierce est très difficile à entendre par rapport à une référence puisqu'il faut se focaliser sur la quatrième harmonique et faire abstraction du reste.
Si l'orgue n'a pas de problème d'alimentation on peut l'accorder directement sur le prestant depuis le premier DO.
Si au contraire, lorsque l'on ajoute des jeux, l'accord flanche (gravure du sommier insuffisante), alors il vaut mieux accorder la tierce avec tous les autres jeux qui doivent sonner avec ( 8', 4', 2' 2/3, 2'). Ensuite tout est affaire de patience, concentration, expérience... bref, c'est pour le facteur d'orgues.
Souvent dans l'aiguë, on termine en octave sur elle même.
st nicolas
Re: accord et méthode
lundi 14 juin 2004 22:52:02
A l' intention de mr Chevalier : accord de son bourdon.
L'accord en tempérament strictement egal est tout a fait possible par un harmoniste confirmé. L'ideal est d'avoir un petit mannequin portatif muni d'une ou deux octaves de prestant (ou d'une bonne gambe) à manchons coulissants (ou d'entailles de timbre) sur lequel il accordera votre jeu.Le bourdon étant ce qu'il y a de pire pour realiser une partition en quelque temperament que ce soit ! Je suppose bien entendu le non emploi de bidule electronique aussi précis soit-il ...
La réalisation d'un tempérament ne se satisfait jamais d' un simple copiage de fréquences note à note ! Le calibrage des intervalles : quinte, quarte,sixtes, tierces est hautement plus précis et probant !

st nicolas
Re: accord et méthode
lundi 14 juin 2004 23:58:00
A l'intention de Mr lemonnier : accord des anches .
Des 3 méthodes que vous indiquez , seule la 2 éme est "potable". Potable si le prestant 4 avec lequel vous opérez est correctement accordé : ce qui est rare ... La première, si je vous ai bien lu , ne vaut strictement rien . Le prestant n' a aucune précision dans la 1ère octave , la trompette a tendance à lui imposer sa propre fréquence surtout s'ils se trouvent tous les deux sur une gravure identique : vous obtiendrez presque toutes les hauteurs que vous voudrez ... quant à la 3 ème ... sans commentaire .

Re: accord et méthode
lundi 1 novembre 2004 21:15:07
Et il pourrait être utile aussi de se référer au TRAITE DE L'ACCORD DE L'EPINETTE qui traite abondamment des orgues de Jean Denis (1650), ou il explique une technique d'accord.
Re: accord et méthode
lundi 8 novembre 2004 10:34:45
Quelqu'un saurait-il quelles voyelles doivent être prononcées par tel ou tel type d'anche?



Venez voir l'orgue de Moyeuvre!
Re: accord et méthode
mercredi 7 décembre 2005 20:30:09
J'accorde l'orgue entièrement à l'oreille, sans aucun appareil électronique.
Je procède par la méthode, connue de nombreux facteurs, des battements.
Cette méthode nécessite, bien entendu, de connaître le nombre de battements de chaque intervalle, par seconde.
Il est mieux de compter les battements pendant dix secondes (en regardant la trotteuse de sa montre), pour avoir plus de précision.
La précision est redoutable et il faut très peu d'entraînement pour y arriver.

J'ai expliqué tout cela dans mon livre "Gammes, Accords, Tempéraments", qui est la plus récente publication sur le sujet et qui, pour les tempéraments les plus usités, donne justement les nombres de battements.

Cette méthode permet de "faire la partition" sur une (ou, mieux, deux octaves) : on l'étend ensuite aux autres octaves du jeu, puis aux autres jeux.

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